Dans Putain d’vie !, Didier Perrier met en scène la parole tordue, vivante et quotidienne du poète des gens de peu, Jehan Rictus.
C’est une langue « qui pétille à l’oreille et fait chaud au gosier », l’expression de la gueulante que pousseraient les pauvres si on les écoutait. Poète de la misère du peuple, des gens de peu, Jehan Rictus évoque à travers ses poèmes la mémoire ouvrière et raconte la détresse et la fierté des exclus. Au rythme de l’accordéon, trois comédiens chanteurs, mi clowns-tristes, mi clochards, chantent tour à tour les mots bruts et habitent remarquablement toute une galerie de personnages aussi difficiles qu’humains. Une plongée sensible et émouvante dans cet argot noir du début du XXème siècle qui mêle douleurs, rêves et sarcasmes tout en dégageant une grande humanité. Une poésie qui malgré son âge s’avère terriblement contemporaine.
« C’est un français de la rue parisienne d’il y a longtemps, plein de saveurs et de contorsions, d’images corporelles parlantes. Les comédiens prennent un plaisir visible à cet humour très noir et au génie de l'invective. » L’HUMANITÉ
La nécessité de porter à la scène la parole de Jehan Rictus a été insufflée par Chantal Laxenaire et Dominique Bouché ; un coup de foudre pour cette langue qui pétille à l’oreille et fait chaud au gosier ; une passion pour ce poète de la misère qu’elles ont su nous faire partager.
Nos mots clés pour cette nouvelle aventure collective ? « Confiance », « affinités », « chance », « envie », « hasard », « plaisir du jeu », et « goût du risque » aussi. Et surtout « création ».
Comme d’habitude somme toute. Car c’est toujours la même ligne de conduite que nous tentons de développer, parce que nous croyons que c’est la seule possible. Nous voulons faire passer un souffle en jouant les cartes dont nous avons envie, avec nos passions, nos désirs….
Avec « Putain d’Vie » nous voulons établir une relation différente entre les comédiens et le public, une relation basée sur la proximité.
Avec la volonté d’offrir ce qu’est pour nous le théâtre : regarder, écouter les artistes qui sont des passeurs d’émotion.
Simple, mais nécessaire pour vivre en humain...
DIDIER PERRIER
JEHAN RICTUS ( 1867 - 1933 )
Pseudonyme de Gabriel Randon de Saint-Amand.
Poète, mais aussi romancier, dramaturge et dessinateur, Gabriel Randon a voulu être le Villon de son époque, l’auteur d’une oeuvre où s’exprimerait cette part de la société qui n’a jamais la parole, où l’on entendrait la voix des esclaves, des misérables, des exclus, la voix du peuple.
A l’origine, pourtant, ce n’est pas de ces milieux que Rictus est sorti : né à Boulogne-sur- Mer, il est le fils naturel d’un gentilhomme professeur de gymnastique et d’une fausse artiste qui avait des prétentions nobiliaires.
Après une enfance pénible, qu’il a décrite dans son roman Fil de fer (1906), notre auteur quitte sa mère, mène une existence de misère et trouve finalement un emploi à la Direction de l’enseignement, où il rencontre Albert Samain qui le remarque et l’encourage. A cette époque, il a déjà publié plusieurs poèmes, par exemple dans le Mirliton d’Aristide Bruant et le Pierrot d’Adolphe Willette, dans la Pléiade aussi, la Muse française, la Plume et le Mercure de France. En même temps, il écrit au Matin, au Figaro, au Soir et se lance dans des enquêtes journalistiques, notamment sur les anarchistes.
Sur un plan littéraire, il signe désormais JEHAN RICTUS et, sous ce nom, paraît au cabaret des Quat’ z’ Arts (1896). Là, il récite « l’Hiver », et c’est le succès : Rictus devient une vedette, dont la critique reconnaît le style particulier. Plus tard, il poursuivra sa carrière de diseur au Chat-Noir de Raoul Salis, puis dans différents cabarets.
Ses textes paraissent assez vite puisque les Soliloques du pauvre, où figure le fameux « Revenant », sont publiés en 1897 (« l’Hiver » est paru en 1896) ; ils seront repris dans deux autres éditions, dont la plus célèbre est celle de 1903, qui fut illustrée par Steinlen. Dans le même temps, Rictus, qui publie un pamphlet contre Rostand (Un bluff littéraire : le cas Edmond Rostand, 1903), qui fait représenter une pièce au théâtre de l’oeuvre (Dimanche et lundi férié ou le Numéro gagnant, 1905), travaille à un nouveau recueil : le Coeur populaire sort en 1914, et l’on y retrouve certains poèmes déjà publiés. La guerre marque probablement la fin de la période vraiment productive de Rictus. Certes, il écrit dans quelques revues, s’intéresse à la condition matérielle du poète, participe à des émissions radiophoniques, publie un dernier recueil, la Pipe cassée (1926) : pour le public, cependant, il reste l’homme des Soliloques, le pauvre, le barbu errant des dessins de Steinlen.
Jehan Rictus ?
Une poésie centenaire, qui crie pour nous « aujourd’hui ! ». Une poésie actuelle, c’est bien triste à dire. Qui nous parle comme si elle sortait toute fraîche de notre nouveau millénaire. Quoi, avons-nous fait si peu de progrès, que le « grand squar‘ d’Amour » rêvé par Rictus soit encore aussi loin ? L’un des plus beaux chants de Rictus, le plus beau peut-être, le fameux « si qu’y r’viendrait », imaginant un retour du Christ sur terre, est une sorte de lamento sur la justice sociale qui n’a pas fait un pouce de progrès depuis l’époque où vivait « l’rouquin au coeur pus grand qu’ la vie », un chef d’oeuvre d’une ébouriffante actualité. Ces chants sont une épopée de la rue, où vit et souffre, une population dont la rue est le domaine et si l’on peut dire la maison…les femmes, et la première prostituée. Un chant sur la misère des femmes. Sans attendrissement : l’humour et le rire ne sont jamais loin. La langue du poète est toute fraîche, comme si les fortifs attendaient encore la chanson du « coeur populaire ». L’argot-oh, pas trop- devient la langue poétique, l’argot qui tout à coup donne au poème la surprise et l’obscur d’un Valéry. Jehan Rictus, un poète, oui un vrai poète par les inventions et ces métaphores directes, issues d’un seul jet de la langue commune et qui « pilpatent comme un goujon chopé vivant ». Une très curieuse musique de la langue, qui fait fi des e muets pour la faire sonner autrement. La rime, oui, mais servante et non pas esclave. Un poète à dire, à chanter, une chanson qui comme toute autre, et mieux, dit ce qui est à tous, le désir, le malheur, le rêve, la faim, l’espérance. Sans parler d’une autre espérance, présente, celle d’oeuvrer pour « remett’ tout en équilibre » puisque « l’homme est tout seul dans l’univers ».
ANNE ÜBERSFELD ÉDITIONS LE GEAI BLEU
"Comment parler de la misère et de la pauvreté sans tomber dans le misérabilisme d'une façon presque dérangeante? Réponse délicatement menée pourtant par la Compagnie l'Echappée dans cette création drôle, émouvante, touchante mais surtout drôlement intelligente."
L'HEBDO VAUCLUSE
"En spectateur optimiste, nous retiendrons toutes ces belles choses qui nous ont permis de rêver, de nous évader, de nous émouvoir, de rire, de penser. Décrasser nos cerveaux et nos coeurs, n'est ce pas la mission première du théâtre?"
LA MARSEILLAISE
"Putain d’Vie est l’expression de la gueulante qua pousseraient les pauvres si on les écoutait. La mise en scène est très simple, et c’est ce qui fait toute l’humanité de la pièce. On a le sentiment que les acteurs se mettent à nu devant nous. Ce spectacle vous touchera forcément. Bouleversant."
GAËLLE VALLET. EGAZETTEDUSPECTACLE.COM
"Un spectacle plein de rires et d’émotions. Une mise en scène très soignée de Didier Perrier."
PHILIPPE ROBIN L’UNION
"Un moment superbe de bonheur et presque de fraternité avec cette troupe épatante. C’est d’une beauté brute de décoffrage à en pleurer."
GUY DOMAIN LE PROGRÈS DE LYON