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saison 2022/2023

CROISEMENTS 2

THÉÂTRE | DÈS 14 ANS

AVEUGLES
ou comment se donner du courage pour agir ensemble ?

Mise en scène Vincent Collet
Le joli collectif

Jeudi 30 mars
20h | Durée 1h

Le Drakkar
Tarif A

Comment articuler ensemble le besoin de décision et le désir d’égalité ?
______

Perdus dans une forêt, quatre individus se concertent pour avancer dans une même direction, affrontant leurs doutes et leurs limites. Comment agir ensemble ? Comment fonctionne un ensemble humain lorsqu’il ne souhaite pas se hiérarchiser ? En somme quelle expérience démocratique faire à l’échelle de quatre individus ? Autant de questions qui traversent ce spectacle où s’expérimente devant nous le pouvoir de l’agir du collectif, et où nos systèmes sociétaux et résolument humains sont remis en jeu.
AVEUGLES ou comment se donner du courage pour agir ensemble ? s’inspire autant du petit exposé de Yona Friedman Comment vivre avec les autres sans être chef et sans être esclave ? que de la pièce de Maeterlinck où un groupe se perd en forêt et attend le retour de son guide… tout ceci dans un humour grinçant et imparable.

Très librement inspiré du texte Les Aveugles de Maurice Maeterlinck. Conception et mise en scène Vincent Collet. Ecriture et jeu Marie-Lis Cabrières, Vincent Collet, Fanny Fezans, Vincent Voisin. Collaboration artistique Pierre Déaux. Création lumière Florian Leduc.

© Photo : David Bormans, Aloïs Lecerf

Production : Théâtre de Poche / Le joli collectif – Scène de territoire pour le théâtre, Bretagne romantique & Val d’Ille – Aubigné. Coprods : Au bout du plongeoir – Rennes, Les Fabriques – Nantes, Salle Guy Ropartz – Rennes. Soutien : La Paillette – Théâtre MJC et L’Aire Libre – CPPC, Rennes Métropole et Spectacle vivant en Bretagne. Remerciements : Elisabeth Bouëtard, Marion Le Guerroué.

Site de la compagnie

QUELLE EST L’IDÉE DE CETTE PIÈCE ?
Le point de départ est de chercher à rendre au présent la paralysie d’un groupe suite à un désir de consensus. Et de comprendre en direct comment fonctionne ce groupe, comment fonctionne un ensemble humain, lorsqu’il ne souhaite pas se hiérarchiser. En somme quelle expérience démocratique faire à l’échelle de quatre individus ? La phrase prononcée par l’un des aveugles de la pièce de Maeterlinck « nous ne savons pas ce qu’il y a entre nous » est le point de départ de cette tentative de connaissance.

QUE SOUHAITEZ-VOUS FAIRE ÉPROUVER AU PUBLIC ?
... Lui montrer que l’on est souvent aveugle de ce que l’on est / fait et lui permettre de jubiler de cette situation dans laquelle quatre personnages sont embarqués sous ses yeux.
... Qu’en groupe, il est souvent complexe de se mettre d’accord et que cela nécessite un long processus d’écoute. On peut être collectivement capables, intelligents pour analyser ce que nous avons vécu en commun par le passé, mais totalement absents de ce que nous vivons sur le moment présent, et donc dans l’incapacité d’avancer, de trouver une solution.
... Et peut-être que pour sortir des schémas préexistants en groupe il faut s’inventer une véritable propédeutique (une démarche d’analyse) qui, même si elle ne garantit pas le succès de l’entreprise, demeure une démarche louable et à ce jour la seule connue, même si la paralysie n’est jamais loin.

« Nous ne savons pas ce qu’il y a entre nous »

Les Aveugles de Maeterlinck

QUEL EST LE LIEN AVEC LA PIÈCE DE MAETERLINCK ?
La pièce de Maeterlinck, la fable d’un groupe qui a perdu son guide, est à l’origine du projet. Elle nous permet de planter un paysage, une situation, des enjeux - actualisés. Il s’agit d’un point de départ dont le récit est fait d’entrée de jeu au public, de façon à ce que le doute s’installe : s’agit-il de la pièce qui va se dérouler ? Vont-ils incarner les personnages ? Et ainsi, bien que le spectacle développe ensuite une histoire totalement différente, au final l’essentiel de la pièce de Maeterlinck aura été raconté.

QUELS SONT LES POINTS COMMUNS ENTRE LES AVEUGLES DE MAETERLINCK ET CEUX-CI ?
Quatre archétypes se côtoient, parmi les douze aveugles de Maeterlinck. Ceux qui braveront l’inconnu pétris de certitudes, ceux qui doutent, mutiques. Ceux qui percevront la menace sourde et ceux qui prêcheront le statu-quo, nieront l’évidence d’un danger - d’une mort (d’une paralysie) - imminente. Tous devront affronter leurs propres peurs pour survivre.

Dans ce spectacle, ce que l’on voit ce sont quatre acteurs présents au plateau qui n’ont pas trouvé la forme du spectacle ou l’installation plastique qui raconterait cette pièce au plus près. Très rapidement leur discussion se verrouille autour des enjeux de la pièce : comment vivre cette expérience d’un groupe qui a perdu sa boussole ? Comment expérimenter l’inconnu en groupe ? Pourquoi n’avançons-nous pas ?

Dans la pièce originelle de 1890, un groupe d’aveugles tente de trouver une sortie de la forêt. En 2018, il ne s’agit pas d’une communauté d’aveugles mais d’un groupe d’acteurs qui tente de sortir de l’impasse, de trouver une forme à cette pièce, à cette situation, et surtout essaie de se décider à agir.

Le motif de l’île et de la forêt est très présent dans la pièce de Materlinck comme dans ce spectacle, notamment parce que dans des cas extrêmes et notamment « sur une île, les gens ne s’entretuent pas » (Konrad Lorenz). Ces paysages sont donc très présents dans les aventures dont nous faisons le récit, parce que cette expérience de nature que vivent les quatre interprètes, et dont nous sommes collectivement de plus en plus éloignés devient révélatrice de nos peurs et de nos comportements sociaux, de l’inconnu que nous acceptons de franchir collectivement.

« C’est notre courage que nous devrions partager, pas notre désespoir (...) et prendre garde à ce que celui-ci ne se répande pas par contagion »

H.D Thoreau, Walden ou la vie dans les bois

QUELLES SONT CES « EXPÉRIENCES » QUE VOUS AVEZ EFFECTUÉES EN AMONT ?
Nous avons dès le début voulu savoir ce que racontait pour chacun cette pièce, et avons fait le choix de mettre en place des expériences, à savoir un temps performatif avec des règles, afin d’éprouver les sensations de ces aveugles, ou bien ce qui les agite personnellement. Il y a eu une trentaine d’expériences au total durant plusieurs mois. Chacune était suivie d’un moment de débriefing collectif face caméra suivant le même schéma : exposer la consigne / le déroulé de l’expérience / les perspectives ouvertes. C’est ce qui a été la base de la forme théâtrale.
Le travail performatif a créé une histoire commune, une banque d’images pleine de sensations que chacun réinvestit au plateau.

LES COMÉDIENS JOUENT-ILS DES PERSONNAGES ?
Les comédiens sont présents en tant qu’eux-mêmes et défendent des positions issues de leurs propres réflexions, de leurs propres expériences. Le travail de jeu, de répétition consiste ensuite a tirer un fil différent pour chaque comédien, une pensée, une posture, afin de progressivement constituer une figure. A la manière de la pièce des aveugles où les doouze personnages se partagent quatre archétypes.

« LISTE D’EXPÉRIENCES établie à partir d’une première carte thématique en rapport avec la fable des aveugles
1- Traverser le paysage - récit de performances de L. Tixador/A. Pointcheval
2 – Dialogue des âmes - récit de performances de Marina Abramovic
3- Entre-deux eaux - récit de performances de Esther Ferrer
4 – Litanie - récit de performances de Pierre Huygue
5 - Aveugles en extérieur
6 - Aveugles sur le skatepark
7 - Ecouter nos bruits dans le noir
8 - Traque dans le noir - la nuit dans la forêt
9 - Cartographie d’un chemin imaginaire les yeux bandés
10/A - Marche en groupe & en silence autour du lac
10/B - Marche en groupe, en silence & en ligne droite dans la campagne
11 - Le bloc - conférence sur un sujet inconnu
13 - Dire ses perceptions
etc.. »

S’AGIT-IL D’UNE PLONGÉE DU RÉEL À LA FICTION ?
Très vite, la pièce bascule sous les yeux du spectateur et les quatre plongent dans l’imaginaire, en oublient totalement la situation de départ, ils se déportent, l’air de rien. Ils échafaudent en direct des expériences potentielles pour éprouver ce sentiment d’inconnu, et vivent ces suppositions de manière très intense mais sans jamais bouger de leurs chaises.
Les matériaux de ces récits sont réels pour les acteurs (les expériences vécues) mais leur utilisation est fictionnelle. On sent que ces personnages pourraient à tout moment s’accorder pour agir mais qu’ils s’interrogent sans cesse et s’empêchent, sans cesse effrayés par l’idée que le groupe n’explose. Ils ne se rendent pas compte qu’ils vivent eux-mêmes l’expérience de ces aveugles immobilisés.
Ils expérimentent malgré eux cette immobilité et la font partager au public, le véritable spectateur de ce point aveugle, où les mécanismes de la paralysie sont mis à l’oeuvre de manière sensible.

LE PUBLIC EST DONC COMPLICE DE CETTE SITUATION ?
Oui c’est une donnée essentielle. Cette situation en devient drôle pour le spectateur car la naïveté des personnages est d’autant plus impressionnante qu’ils réfléchissent beaucoup ! Mais à voix haute, avec tout ce que cela comporte de sauts dans la pensée, de spontanéité et d’évidences redécouvertes. Nous sommes plus près de la fable originelle des aveugles, racontée par Franco Sacchetti dans le Trecentonovelle en 1380, une véritable farce comique qui dit qu’un groupe d’aveugles guidé par un aveugle finira irrémédiablement dans un trou, une situation qui suscite le rire pour corriger certains défauts de ses contemporains.

LE PLATEAU SUBIT-IL LUI AUSSI CETTE TRANSFORMATION ?
La fiction rattrape donc malgré eux les comédiens et le plateau se transforme.
Différents états lumineux vont progressivement se superposer à ce qui devient une non-action, notamment des lumières monochromatiques afin de permettre au spectateur de réellement voir en noir et blanc, comme l’expérimente Olafur Eliasson dans de nombreuses installations plastiques.
L’univers de cette cécité, le paysage brumeux de cette île se met en place. Mais les quatre interpètes ne s’en aperçoivent pas, enfermés dans leur schéma de discussion sans fin.

COMMENT LE RECIT EVOLUE-T-IL SUR SCÈNE, QUELLES SONT LES PISTES DE RÉFLEXION ?
Les quatre interprètes découvrent que l’inconnu ne se trouve pas à l’extérieur du groupe mais entre eux. L’ouvrage de Yona Friedman Comment vivre avec les autres sans être ni chef, ni esclave? leur permet de déterminer au moyen de schémas mathématiques et improvisés ce qui se joue entre eux et guide une partie des questions qui se révèlent à eux en direct : Quels sont les shémas qui nous régissent et que nous ne voyons pas ? Comment rendre visible ici et maintenant les influences qui nous agissent ou nous paralysent ? Notamment lorsque nous sommes dans le «pré-agir», puisque n’est-ce pas là que nous sommes pris dans la tache aveugle, c’est-à-dire la difficulté à objectiver ce que nous sommes en train de faire ?
La disposition à l’anticipation du risque est très profondément enracinée dans le cerveau humain et se trouve couplée à une forte tendance à surestimer les faibles probabilités. Ce qui peut être tout à fait paralysant.Seulement cela représente une réelle difficulté de rester dans un statu quo en refusant d’explorer.
Peut-on désigner ses hantises collectivement pour aller au-devant de ses peurs et les modifier, à l’inverse d’une pensée individualiste et néolibérale qui cultive l’absence de recul sur « le qui-suis-je » et « ce que je mets en jeu avec les autres » ?
Enfin, ces précautions autour du fonctionnement d’un groupe ne nous rendent-elles pas malgré tout aveugles à d’autres urgences extérieures ?

« Le pouvoir correspond à l’aptitude à agir de façon concertée »

Hannah Arendt

PREMIER EPISODE D’UNE TRILOGIE :  POUVOIR / OU PAS
Aveugles constitue le premier volet d’un travail en trois parties autour du pouvoir. Ce premier épisode questionne le pouvoir en tant que sentiment de capacité, de possibilité d’organisation au sein d’un groupe social réduit (association, conseil municipal, famille).
Le pouvoir est fréquemment analysé sous une forme ternaire : qu’il s’agisse de Montesquieu, qui établit la division contemporaine des pouvoirs (exécutif/législatif/judiciaire), des sociétés humaines traditionnelles qui établissent une division entre les pouvoirs reliés au passé (le sage) / au présent (le chef) / au futur (le barde, le chaman) ou le sociologue politique Steven Lukes qui établit trois dimensions du pouvoir de contrôle : imposer une décision / éviter certains sujets / influencer idéologiquement.
C’est ainsi que j’ai décidé d’entamer une étude du pouvoir, plus sensible, moins rationnelle mais éclairante, au travers de trois créations :
- Créé en 218 : AVEUGLES ou comment se donner du courage pour agir ensemble
- Créé en nov 2019 : ANTIGONE, une autre histoire de l’Europe - inspiré de la pièce de Brecht, ce second épisode questionne au plateau le corps du pouvoir dans les coulisses de l’exécutif. Ici ce sont les coulisses de Bruxelles qui sont observées. Dans ce lieu supra-gouvernemental, où se situe le pouvoir ? Qui prend les décisions ?
- Création en 2022-23 / JUSTICE.S - ce dernier épisode dont les recherches ont commencé en décembre 2018 portera sur le sentiment de justice qui se loge en chacun de nous. Interroger cet aiguillon interne c’est faire le lien entre les valeurs, les attentes d’individus et le cadre intrinsèque à chaque société, chaque territoire.

UNE ÉQUIPE - UNE DÉMARCHE
Les quatre mêmes interprètes seront distribués dans ces trois volets. La logique d’appropriation d’un sujet par l’expérience réelle et d’une écriture qui se tisse entre la discussion au plateau autour de cette expérience et l’émergence d’une situation fictionelle sera la même.

BIBLIOGRAPHIE
• Yona Friedman, Comment vivre avec les autres sans être chef et sans être esclave ?
• James Teboul, Philippe Damier, Neuroleadership, le cerveau face à la décision et au changement
• Peter Gray, Libre pour apprendre
• Henry David Thoreau, Walden ou la vie dans les bois
• Peter Handke, La chevauchée sur le lac de Constance
• Maurice Maeterlinck, Le trésor des humbles
• Gaston Bachelard, L’eau et les rêves
• Konrad Lorenz, Il parlait avec les mammifères, les oiseaux et les poissons, tous les chiens, tous les chats

VINCENT COLLET est depuis 2010 à la codirection du Théâtre de Poche, Scène de territoire pour le théâtre Bretagne romantique - Val d’Ille-Aubigné avec Damien Krempf, Robin Lescouët et Enora Boëlle. Metteur en scène et comédien, titulaire d’un master mise en scène et dramaturgie à l’Université Paris X Nanterre, il monte plusieurs textes d’auteurs de langue allemande ou de l’est de l’Europe : Kroetz, Srbljanovic, Jelinek, Schimmelpfennig avant d’envisager une approche plus docu­mentaire ou performative de la parole sur scène qui lui fait retrouver le chemin du plateau.

MARIE-LIS CABRIÈRES s’est formée au Théâtre National de Toulouse, et vit et travaille actuellement dans le Centre Bretagne. Elle a joué, entre autres, dans des spectacles mis en scène par Laurent Pelly, Sébastien Bournac, Adrien de Van. Elle initie des spectacles qui mêlent des auteurs, des comédiens et des musiciens (Aveyron, Paris et Bretagne) en collaboration avec l’auteure Marie Dilasser. Actuel­lement, elle travaille avec HVDZ et le metteur en scène Guy Alloucherie sur des Portraits de villages dans le Nord Pas-de-Calais.

PIERRE DÉAUX est diplômé à la fois du Conservatoire National Supérieur d’Art Dra­matique de Paris et du Centre National des Arts du Cirque. Dans son travail, théâtre et cirque sont étroitement liés, il interroge l’un pour mieux révéler l’autre et récipro­quement. Il prend plaisir à alterner les rôles : créateur de ses propres spectacles, interprète pour d’autres ou regard extérieur. Au cirque, il a participé au cabaret de fin de la 17e promotion du CNAC Toto Lacaille (tournée sous chapiteau en 2006), a travaillé avec Nikolaus dans Raté-Rattrapé-Raté de 2007 à 2009 et a été regard extérieur du spectacle Miettes de Rémi Luchez en 2008. En 2011, il apporte un regard extérieur pour la création de la compagnie Un loup pour l’homme, Face Nord. Depuis 2013-2014, il travaille sur les créations d’Olivier Debelhoir, de Jonas Seradin (Galapiat cirque) et avec le Groupe Merci.

FANNY FEZANS s’est formée à L’ERAC de 2005 à 2008. Elle collabore régulière­ment depuis sa sortie avec le joli collectif auprès de Vincent Collet (Mange, Peggy pickit , Avant / Après, Aveugles), en tant que marionnettiste avec la Compagnie Ar­ketal auprès de Sylvie Osman (Partition en solitude, le Conte d’hiver, Passagers clan­destins), avec la Compagnie Désordre alphabétique auprès de Jacques Dor (Anges, chaos et autres féeries, Un Don quichotte...), avec Clara Chabalier de la compagnie Pétrole (Calderon, Autoportrait...) et Constance Larrieu (Manque, Canons).

VINCENT VOISIN est issu de la seconde promotion de l’école du TNB. Il a travaillé entre autres avec Giorgio Barberio Corsetti, Jean-Paul Wenzel, Matthias Langhof, Laure Wolf. En 2000, il rencontre le Théâtre des Lucioles et participe à plusieurs créations sous la direction de Pierre Maillet et Mélanie Leray. Entre 2003 et 2008 il forme un duo avec Stéphanie Marquet proposant de nombreuses performances au sein du collectif HALO à Montpellier. Depuis 2011, il est interprète sur plusieurs spectacles du joli collectif sous la direction d’Enora Boëlle et Vincent Collet. Il est aussi assistant à la mise en scène sur les deux dernières créations de Mélanie Leray. En 2018, il mettra en scène Carnet de poche, une création qui résumera plus de 10 années d’enquête sur le journal intime d’Henriette L M.

Le joli collectif est une histoire. Celle tissée autour des parcours de deux metteur.e.s en scène, auteurs et interprètes de leurs propres créations, Enora Boëlle et Vincent Collet. Un collectif d’énergies et d’envies dont les orientations pointent vers la recherche et l’expérimentation liées au politique et à l’intime.

Cette association a débuté dès 2002 alors qu’Enora Boëlle et Vincent Collet étaient encore étudiant.e.s  à Paris (2002-2008).
Les premières créations des deux artistes, d’abord jouées dans le cadre universitaire (Master Mise en scène et Dramaturgie – Paris X Nanterre), ont depuis quelques années trouvées leur place sur les scènes françaises et francophones en Europe. Lors de la dernière saison les partenaires du joli collectif ont par exemple été la Balsamine (BE), la Passerelle - Scène nationale (22), le Grütli (SW), le TU (44), le CDN d’Aubervilliers ou le Festival Marmaille (35).

Depuis 2010 Le joli collectif est à la direction du Théâtre de Poche - désormais labellisé « Scène de territoire pour le théâtre » - à Hédé-Bazouges, une commune de 2000 habitants au nord de Rennes (35). Les deux directeur.ice.s artistiques ont pu y réunir une large équipe en invitant à les rejoindre collaborateur.ice.s artistiques, chargé.e.s de productions, graphiste, administrateur.ices, chargé.es de communication et des relations avec les publiques, , comédien.ne.s, créateur.ice.s lumière, photographes …

Vincent Collet et Enora Boëlle ont ainsi convié des dizaines d’artistes à travailler sur ce territoire et largement mené une ouverture vers des publics divers, en défendant une programmation riche et exigeante, proposée en parallèle de la création de leurs spectacles respectifs.
Ces onze années plongées dans une émulation culturelle intense continuent à nourrir la recherche et la créativité des deux artistes adeptes des différentes formes d’autofiction et du soutien aux esthétiques transversales.

Jolie performance que celle de ces bretons, par ailleurs en charge du Théâtre de Poche, à Hédé-Bazouges (35). Aveugles est issu d’une écriture collective maîtrisée et jubilatoire, portée au plateau par Vincent Collet. Une plongée dans la fabrique de théâtre, dans ce qui, ici comme ailleurs, permet de créer du « faire ensemble ». Théâtre(s)

Quatre comédiens parfaitement voyants sont dans l’optique de mettre en scène les Aveugles, une pièce de Maeterlinck dans laquelle une quinzaine de non-voyants immobiles attendent désespérément le guide que le spectateur voit mort dans un coin de la scène. Ils vont tenter de répondre à cette question primordiale avant de se lancer dans la création du spectacle : comment éprouver la paralysie totale à laquelle sont en proie ces personnages perdus et dépendants ? (…) les propositions paraissent absurdes et loufoques comme ça, mais elles font sens lorsqu’elles sont liées à la dialectique d’un texte intelligent, juste et drôle, servi par des comédiens qui le sont tout autant. (…) Mais les imaginaires lyriques de chacun dérivent, l’une crie, l’autre se lève, tous essayent de compter mais trois s’endorment ; comment rester unis, ensemble sans se voir alors que même en se voyant on n’y parvient pas ? La pièce ne tranche pas, on tâtonne sans trébucher jusqu’à la fin dans un clair-obscur qui n’est ni noir ni blanc. Après un long moment de noir plateau que les comédiens qui devraient être voyants ne semblent même pas avoir remarqué, un projecteur nous lance son dernier éblouissement aux yeux, et on l’attrape. Célia Jaillet | Le bruit du off

Au sein d’un groupe non hiérarchisé́ comment s’écouter, se concerter, prendre des décisions, agir ? Comment éviter la paralysie ? Afin de nourrir leur approche, les comédiens ont traversé́ diverses expériences – telle la n°8 : Traque dans le noir – la nuit dans la forêt – suivies d’un débriefing collectif afin de pouvoir s’approprier la thématique de manière empirique et la plus juste possible. Ce travail performatif a créé́ « une histoire commune, une banque d’images pleines de sensations que chacun réinvestit au plateau. » Tout entiers livrés à l’expérience de l’organisation d’une démocratie embryonnaire, les quatre protagonistes questionnent leurs peurs et leurs doutes face à l’inconnu, révèlent aussi certaines explications de nos comportements. Naïfs, ils basculent dans l’imaginaire, échafaudent des hypothèses... L’ouvrage de l’architecte et sociologue Yona Friedman Comment vivre avec les autres sans être chef et sans être esclave ? a aussi inspiré la pièce, invitant à s’extraire des logiques individualistes, à prendre conscience d’influences qu’on ne voit pas et qui pourtant nous régissent. Incluant le public, le théâtre est assurément ici un outil qui agit... Agnès Santi | La Terrasse