Un récit intime sur la naissance du désir amoureux et la différence à l’adolescence.
Vincent, un élève de 3e drôle et attachant, au physique d’endive, va découvrir le sentiment amoureux. Identification du trouble, incompréhension, culpabilité, peur, acceptation des uns, rejet des autres. Qui suis-je ? est l’histoire d’un adolescent banal qui se retrouve confronté à ses désirs, jugés anormaux par les autres. Adaptation du premier roman de Thomas Gornet, le spectacle décrit magnifiquement cette période et ses problématiques avec tendresse, humour et profondeur en en évitant tous les clichés. Sur scène, trois comédiens interprètent tous les personnages, accompagnés par la projection des dessins d’Hugues Barthe donnant vie aux décors. Mis en scène par Yann Dacosta, le spectacle traite de la différence de manière touchante, légère et positive.
D’après le roman de Thomas Gornet © L’école des loisirs. Mise en scène Yann Dacosta. Dessinateur Hugues Barthe. Avec Théo Costa Marini, Côme Thieulin et Manon Thorel. Scénographe Grégoire Faucheux.
Production Compagnie Le Chat Foin. Coproductions DSN – Dieppe Scène Nationale, l’Etincelle – Théâtre de la Ville de Rouen, le Rive Gauche – Saint-Etienne-du-Rouvray, l’Atelier à spectacles – Vernouillet. Soutien la Rotonde – Petit-Couronne. La Compagnie Le Chat Foin est conventionnée par le Ministère de la culture et de la communication / Drac Normandie, la Région Normandie et la Ville de Rouen.
© photo : Arnaud Bertereau - Agence Mona
SPECTATEURS TÉMOINS
VENDREDI 23 FÉVRIER
Vendredi 23 février, à 18h30 au Drakkar.
La compagnie Le Chat Foin travaillera pendant 2 semaines au Drakkar pour la création de Qui suis-je ?, qui mélange théâtre et bande-dessinée. [+]
Qui suis-je ?, c'est le roman que j'aurais adoré lire quand j'étais collégien.
Comme pour beaucoup d'enfants, mes années collège ont été d'une grande violence. Ce sont des années charnières à haut risque.
Nous sommes à la fois extrêmement vulnérables et abondamment agressés.
C'est l'âge de la naissance du désir amoureux et éventuellement la prise de conscience de sa différence, ou bien, pire encore, l'impossible prise de conscience de cette différence.
Dans son premier roman, Thomas Gornet décrit magnifiquement bien cette période et ses problématiques avec finesse, tendresse, humour, profondeur et surtout en en évitant tous les clichés.
Qui-suis-je ? C'est le parcours de Vincent, un élève de 3ème, au physique « d'endive », qui va mettre une année à prendre conscience de son homosexualité. Identification du trouble, incompréhension, culpabilité, peur, acceptation, rejet, voire harcèlement des uns, soutien des autres. Cela peut arriver plus ou moins tard, cela peut parfois durer plus ou moins longtemps mais ces étapes sont les mêmes dans la majeure partie des cas.
Personne n'est préparé à cela. Surtout pas quand on est un adolescent de 14 ans. Ce roman aborde le sujet de façon tellement, juste, sensible et poignante qu'il peut devenir un véritable soutien pour les jeunes concernés par ces problématiques de quête d'identité, et une formidable sensibilisation pour ceux qui l'entourent.
Aziz et Myriam sont les amis de Vincent. Ils soutiennent leur ami bouc émissaire des autres élèves mais aussi de certains professeurs ; dont l'authentique professeur de sport qui ne rate jamais une occasion d'humilier Vincent quant à ses contre-performances sportives.
Puis un jour un nouvel élève fait son apparition: Cédric. Vincent connaît alors un trouble dont il ne parvient pas à identifier l'origine. Les notes chutent, quelque chose se passe en lui. Les autres lui balancent des méchancetés, Cédric l'ignore soudainement. Même son ami Aziz prend ses distances. De bouc émissaire, il devient pestiféré. Même Pascal, l'autre « tête de Turc » de la classe dont tous se moquaient, le rejette également. Vincent perd tous ses repères. Myriam elle, a tout compris depuis bien longtemps. Elle lui envoie des signaux mais Vincent ne saisit rien de ce qui se passe. Puis arrivera la révélation : Vincent est tout simplement tombé amoureux… Mais d'un autre garçon.
Qui suis-je ?, c'est l'histoire d'un adolescent banal qui se retrouve confronté à ses désirs, jugés « anormaux » par les autres.
Yann Dacosta
Ce qui m'a particulièrement parlé dans ce roman ce sont les scènes qui se passent dans le vestiaire. Le vestiaire devient le lieu cauchemardesque absolu. Il annonce l'humiliant cours de sport à venir. Il est l'endroit de toutes les brimades, mais aussi de tous les troubles puisque c'est ici que nait le désir inavouable pour le corps des autres garçons.
Encore aujourd'hui je me souviens précisément de ce lieu de l'appréhension absolue et de ce sentiment mêlé de peur et de trouble lié au vestiaire de sport.
C'est ce vestiaire qui inspirera les lignes de la scénographie.
Le récit sera porté par trois comédien(ne)s. Côme Thieulin interprétera Vincent, Théo-Costa Marini et Clémentine Allain interpréteront tous les autres.
Tout le récit sera accompagné par un travail de bande dessinée réalisé par Hugues Barthe qui sera projeté sur le vestiaire/écran de projection.
Personnages et décors accompagneront l'histoire de Vincent qui, à l'instar du roman, vacillera entre éveil du désir, ouverte des blessures, naïveté et maturité, tendresse et rage, sensibilité d'enfant et intelligence adulte, humour et gravité.
NB : L'adaptation du roman a été faite en collaboration avec l'auteur.
Yann Dacosta
Le succès du récent roman (et spectacle) Oh, Boy ! Nous a démontré que la littérature jeunesse pouvait capter les enfants en abordant des sujets très sensibles.
Le talent de Marie-Aude Murail avec Oh, Boy ! Comme celui de Thomas Gornet dans ses différents romans est de trouver une manière sensible, légère, positive et humoristique de traiter des sujets délicats.
Les enfants sont baignés au quotidien dans des thématiques difficiles. Touchés de près, parfois de très près, ou de plus loin ils sont tous confrontés à la séparation, à la maladie, au deuil, à l'exclusion, à la violence, au rejet, au harcèlement, à la quête d'identité sexuelle… la littérature jeunesse est réussie et salvatrice lorsqu'elle parvient à trouver la bonne manière de parler de ces sujets.
Les adultes se doivent d'aborder ces questions avec les enfants. Le théâtre et la littérature deviennent alors des outils essentiels pour mettre des mots et des images sur des questions et des blessures.
Qui suis-je ? Aborde les questions que se posent de nombreux préados. Faire entendre ce texte c'est leur dire qu'ils ne sont pas tout seuls à se poser ces questions-là. C'est les inviter à aller vers les autres, à poser leurs questions à sortir de leur enfermement.
Et c'est aussi faire comprendre à tous les autres ce que peut ressentir un camarade victime de méchancetés et de brimades quotidiennes.
Ce spectacle, je l'espère, permettra la rencontre avec un personnage en chair et en os, qui sera présent sur la scène, et que nos jeunes spectateurs apprendront à connaître, à aimer et avec lequel ils pourront s'identifier.
Qui-suis-je ? Provoquera des discussions entre les jeunes spectateurs. Que ce soit en famille, entre amis ou en classe ils débâteront, ils s'interrogeront, ils bougeront, peut-être, changeront d'avis, je l'espère, mais quoi qu'il arrive, et c'est là le plus important : ils en parleront.
Pour que les jeunes s'intéressent au monde dans lequel ils vivent et aux autres nous nous devons de les stimuler avec des problématiques fortes et fondamentales.
Enfin, si j'ai envie de porter ce roman à la scène c'est surtout parce que grâce à son humour, grâce à la personnalité drôle et attachante de Vincent, le spectacle sera porteur d'espoir, de positivisme et de réconfort.
Yann Dacosta
« Je me suis toujours demandé ce que les gens entendent par « crise d'adolescence ».
Je me demande si chez moi, elle ne se traduit pas comme ça : une endive incapable de supporter son reflet.
Bref. Je me regarde.
J'ai la raie au milieu.
Pourquoi ? C'est un peu moche, pas vraiment à la mode.
Sur la tablette, le pot de gel de Thibault.
Lui a les cheveux très courts et les tient ébouriffés grâce à l'effet “saut du lit“.
Ça fait plutôt “dans le pâté“ comme effet mais c'est sans doute moins vendeur “dans le pâté“.
Demain, je change de coiffure »
« Je repense à Myriam.
A Aziz et ses pieds qui puent.
Aux cours de montée à la corde.
A la première fois où j'ai vu Cédric.
Je regarde ses cheveux noirs.
Ses yeux noirs. Son jean.
L'élastique de son caleçon qui en dépasse.
La grosse boule angoissante monte en moi.
OK. Je crois que j'ai compris. Ça va pas être facile.
Je m'appelle Vincent Latan. J'ai quatorze ans et demi.
Je suis en troisième au collège Jean-Moulin.
J'ai eu de sales notes pendant deux trimestres, mais en fait je suis trop fort.
Dans la cour de mon collège tous les garçons se traitent de “pédés“ et d' “enculé ».
Et je suis amoureux de Cédric Martineau »
En général, la « cuisine » interne d'un spectacle échappe aux spectateurs et c'est une bonne chose qu'ils ignorent tout des secrets de son élaboration.
Mais, il y a, comme dans tout, des règles qu'on peut transgresser et c'est une démarche que Yann Dacosta affectionne et qu'il a mise en application cette semaine. Il y a chez lui comme une manière de mettre à nu son travail et de démonter, à travers des « maquettes » préliminaires, les rouages des productions qu'il met en scène.
C'est un exercice qui relève de l'initiation surtout quand il s'adresse à un jeune public dont la curiosité est aiguisée tout autant par les textes, le plus souvent contemporains, qu'il découvre que par les moyens mis en oeuvre pour parvenir jusqu'à eux.
Le « Qui suis-je ? » de Thomas Gornet est exemplaire de cette démarche intellectuellement généreuse.
Le travail réalisé en amont par le « Chat Foin » était ainsi présenté à la Chapelle Saint-Louis devant des « regards amis » mais surtout devant des élèves de troisième qui ont pu, d'une certaine manière, prendre leur part des attentes contradictoires qui traversent l'adolescence et qui forment l'argument de la pièce.
L'histoire se déroule dans le vestiaire d'un établissement scolaire. Lieu de rencontre entre copains mais aussi espace de solitude ou de trouble que l'amitié seule ne parvient pas à combler.
Dans cet environnement « survitaminé » où des jeunes gens se cherchent et jaugent leur propre personnalité ou leur propre faiblesse en se lançant des défis réciproques, il y a ceux qui s'affirment et d'autres qui au contraire en viennent à se poser la question fondamentale du « Qui suis-je ? »
Sur ce thème essentiel, Thomas Gornet a construit une histoire dans laquelle les attentes, les doutes, les espérances et les non-dits engagent les comportements de toute une vie.
C'est sensible, d'une grande justesse de ton et d'une pudeur absolue. La pièce se déroule entre trois comédiens qui endossent plusieurs personnages à l'exception du héros principal autour duquel viennent se fracasser les lazzis et les brimades.
Pour présenter cette ébauche de spectacle, la proposition de Yann Dacosta s'est répartie entre deux postulats. D'un côté, il y a la pièce en devenir qui prend progressivement sa réalité à l'aide d'éléments de décors et dans des lumières qui sont encore en devenir et de l'autre une lecture dans laquelle les mots prennent leur sens sans le secours de la scénographie.
Dans ce double exercice, les comédiens naviguent entre la réalité de la scène et l'exercice préparatoire du texte avant d'entrer dans le jeu lui-même. On y retrouve Manon Thorel dont on connaît déjà la pertinence (on l'a vue, entre autres, chez Thomas Jolly) et deux nouvelles personnalités qui sont d'heureuses révélations, du moins, pour la Normandie. Il s'agit de Côme Thieulin qui fait valoir une belle sensibilité dont les fragilités viennent se heurter à la solide présence, quasi animale, de Théo Costa Marini.
La mise en scène s'appuie pour une grande part sur la projection des dessins de Hugue Barthe et la scénographie de Grégoire Faucheux. D'après ce qu'on peut en juger dès maintenant, l'ensemble baigne dans un climat où les lumières et les jeux d'ombres habillent un univers dépouillé qui laisse aux comédiens toute latitude pour s'investir avec passion et enthousiasme dans ce qui sera un beau message de tolérance et d'espoir, pour tous ceux qui cherchent une réponse à ce « Qui suisje ? » qui les taraude.
Réalisé avec le soutien de « La Rotonde » à Petit-Couronne, « Qui suis-je ?» est coproduit par Dieppe Scène Nationale, le Rive-Gauche, L'Etincelle et l'Atelier des Spectacles à Vernouillet et sera présenté au Rive-Gauche les 15 e 16 mars 2018
François Vicaire - Théâtre en Normandie
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