Halka ou l’énergie du cercle.
Dans Halka, les artistes du Groupe Acrobatique de Tanger questionnent avec leurs corps les mémoires d’un art qui a façonné leur rapport au monde. Leurs prouesses acrobatiques, puissantes et singulières, puisent dans cette tradition le vocabulaire de leur création contemporaine. Elles dialoguent avec leur musique, composée de poésie déclamée, de cris, de chants et de percussions. Les artistes jouent avec des éléments d’apparence anodine pour nous faire partager leur histoire intime. Ainsi en est-il de la facha, cette ceinture de tissu enroulée autour de la taille de l’apprenti acrobate sensée l’aider à s’élever dans les airs. Ou de la djefna, bassine de métal destinée à la lessive mais aussi instrument de fête dans les mariages. Les acrobates explorent les contradictions de leur monde tiraillé entre sacré et profane, goût pour le spectaculaire et présence de l’invisible, authenticité et emprunts. Ils expriment aussi avec un humour sans limite cette liberté d’avoir pu franchir, grâce à cet art, les frontières géographiques, culturelles, genrées, sociales... Abandonnons nos repères et laissons-nous envoûter par l’énergie de leurs corps multiples, acrobatiques et sonores !
« Avec Halka, le groupe de douze hommes et deux femmes revient aux sources d’un art inventé sur les plages, dont l’origine pourrait être guerrière. » TÉLÉRAMA
Création Collective Groupe acrobatique de Tanger : Najwa Aarras / Lamiae El Alaoui, Mohamed Takel, Amal Hammich, Mohammed Hammich, Mustapha Aït Ouarakmane, Adel Châaban, Mohammed Achraf Châaban, Mhand Hamdan, Abdelaziz El Haddad, Samir Lâaroussi, Younes Yemlahi, Ouahib Hammich, Hamza Naceri, Hammad Benjkiri • Collaborations artistiques Abdeliazide Senhadji, Airelle Caen, Boutaina el Fekkak. Collaborations acrobatiques Abdeliazide Senhadji, Airelle Caen, Nordine Allal. Collaboration en acrobatie marocaine Mohammed Hammich (le père). Création lumière Laure Andurand. Régie lumière Cécile Hérault. Création musicale Xavier Collet. Régie son Edouard Heneman, Anthony Biscarat. Costumes Ayda Diouri. Production et diffusion Jean-François Pyka. Administration et développement Pauline Horteur. Direction du groupe Acrobatique de tanger Sanae El Kamouni.
Production dassociation Halka (Paris – France). Coproduction avec l’association Scènes du Maroc (Tanger – Maroc). Coproductions et résidences Biennale de la danse de Lyon 2016, CIRCa, Auch, Gers, Midi-Pyrénées, pôle national des Arts du cirque, Plateforme 2 Pôles Cirque en Normandie I La Brèche à Cherbourg – Cirque Théâtre d’Elbeuf. Coproductions Bonlieu, scène nationale d’Annecy, Agora, Pole National des Arts du Cirque de Boulazac-Aquitaine, C.N.C.D.C. Châteauvallon – Scène Nationale, Archaos, Pôle National des Arts du Cirque Méditerranée, Château Rouge, scène conventionnée, Annemasse, San Sebastian 2016, Capitale Européenne de la Culture. Le spectacle Halka reçoit le soutien de la Direction des affaires culturelles d’Ile-de-France (DRAC) et de l’ADAMI. Le Groupe acrobatique de Tanger est soutenu par la Fondation BNP-Paribas, la Fondation BMCI, le Ministère de la Culture du Maroc, la délégation provinciale de la culture à Tanger, L’Institut Français de Tanger
© photo : Richard Haughton
VENDREDI 8 DÉCEMBRE 19H
Avant le spectacle, scène ouverte à la classe des ateliers de jazz du Conservatoire à Rayonnement Départemental Camille Saint-Saëns. [+]
Le Groupe acrobatique de Tanger place la culture populaire au cœur de son projet, une culture militante et démocratique, accessible à tous. Questionner, conserver et valoriser l’acrobatie marocaine sont ses priorités. Il fonde sa démarche sur la recherche permanente des liens entre un art ancestral et la création contemporaine, un territoire et sa population. Comme si le geste n’allait pas sans la voix et si l’énergie du mouvement se puisait d’abord dans le souffle choral, les acrobates accompagnent leurs mouvements de chant et de musique.
« L’acrobatie marocaine est un joyaux, pas une pratique spectaculaire mais un mode de vie (...)» Aurélien Bory
Née d’une tradition guerrière, cette acrobatie est résolument un art de cirque plus que de théâtre, combinant pyramides humaines, roues et sauts. Dans cette double dialectique qui le caractérise - tradition et création contemporaine, le Maroc (en terre africaine) et la France (en Europe) - le Groupe Acrobatique de Tanger nous confronte aux extraordinaires sujets du monde d’aujourd’hui et s’inscrit dans le sillon des recherches les plus innovantes du cirque contemporain en France.
À l’origine du Groupe acrobatique de Tanger, il y a une femme passionnée: Sanae El Kamouni. Depuis son enfance, elle est habituée à voir des enfants de Tanger voltiger sur les plages, les places publiques, ou lors de festivités. Car il existe au Maroc une acrobatie unique au monde, avec une histoire ancestrale, maintenue à un très haut niveau grâce à de nombreuses troupes et familles. Celles-ci sont hélas cantonnées à reproduire toujours les mêmes numéros qu’elles montrent dans la rue, dans les cirques traditionnels ou au gré des contrats qu’elles trouvent dans le tourisme et le divertissement. C’est en 2003, lorsqu’elle rencontre Aurélien Bory en pleine création de son spectacle Plan B au théâtre Garonne à Toulouse, que Sanae perçoit les premiers liens qui pourraient exister entre l’acrobatie marocaine et le cirque contemporain.
Aurélien Bory
Séduite par la démarche artistique et l’univers d’Aurélien Bory, Sanae invite l’artiste à Tanger, pour rencontrer des acrobates traditionnels et animer un atelier avec eux. Ensemble, ils partent en repérage dans tout le pays pour recruter des acrobates, mais c’est finalement à Tanger qu’ils rencontrent les Hammich, venus en fratrie et aussi avec quelques amis. Tous très bons acrobates, ils se connaissent depuis longtemps. La famille Hammich est une famille d’acrobates traditionnels depuis au moins sept générations. Les enfants sont sur les planches dès l’âge de 3 ans. Et comme lors de ses voyages, Mohammed Hammich, le père, a vu de nombreuses femmes acrobates, il a aussi initié les femmes de sa famille.
La rencontre est si intense qu’au lieu des ateliers initiaux, douze acrobates, dix hommes et deux femmes s’embarquent dans la création du spectacle Taoub sous la houlette d’Aurélien. Créé en 2004 dans les jardins de la Mendoubia au coeur deTanger, le spectacle tourne pendant 6 ans dans plus de 20 pays jusqu’à NewYork au New Victory Theater à Broadway où il fait salle comble. C’est grâce à toutes ces tournées que le Groupe acrobatique de Tanger trouve son nom. En 2007, Martine Tridde-Mazloume (responsable du mécénat Groupe BNP Paribas) s’intéresse au Groupe acrobatique de Tanger et lui apporte le soutien de la Fondation. Elle joue ainsi un rôle important dans son évolution et son développement.
Martin Zimmermann et Dimitri de Perrot
L’aventure aurait pu s’arrêter là. De la « plage à Broadway », il y a matière à légende certes. C’est sans compter la fidélité d’Aurélien Bory qui continue de soutenir le groupe et conseille l’invitation de deux célèbres metteurs en scène suisses, Martin Zimmermann et Dimitri de Perrot, afin de lancer une nouvelle création. En 2009, ils créent Chouf Ouchouf. Ce second spectacle enflamme le festival d’Avignon, tourne lui aussi dans de nombreux théâtres d’Europe et a été couronné par l’obtention du prix de l’excellence artistique du festival de Brighton en 2011. La Fondation BNP-Paribas est elle aussi de toutes les aventures et permet par la permanence de son soutien la survie d’une troupe hors de tous les cadres.
Derrière le succès, le travail humain est considérable. Sanae El Kamouni est cette pièce maîtresse du Groupe Acrobatique de Tanger, à même de faire le lien entre les mondes et de veiller à la cohésion du groupe. Les défis en matière de franchissement des frontières, de langues, d’évènements de la vie, de relation à la tradition constituent l’épaisseur de la troupe. Elle se constitue en association en 2010 et se domicilie à Toulouse sur les terres de la Compagnie 111 qui accompagne son développement depuis le début, puis à Paris en 2015 (association Halka). Même si la relation à la France fut toujours privilégiée, cette année est un tournant : la réalité économique et artistique du Groupe acrobatique de Tanger s’ancre en France, avec toute la singularité de ce lien que ce dernier tisse entre les deux rives de la Méditerranée.
Marseille 2013
Lorsque Dominique Bluzet, le directeur du Grand Théâtre de Provence parle à Aurélien Bory d’un projet pour l’évènement, le Groupe acrobatique de Tanger sonne comme une évidence pour l’artiste « Leur place dans cette manifestation est totalement légitime. Leur acrobatie est unique. J’ai eu envie de les retrouver. J’aime les aventures improbables et la nôtre l’est ». Cette fois, il ne s’agit plus de produire le spectacle àTanger avant de le faire tourner mais bien d’inscrire la création en France. Quatre mois de résidence à l’Etang des Aulnes, à Circa (Auch) et au Grand Théâtre d’Aix en Provence donne naissance au spectacle Azimut. Dans ce spectacle, il est question des racines spirituelles de l’acrobatie, héritage du soufisme. La compagnie élargit sa dimension. Elle s’implique dans des actions en direction d’établissements scolaires et d’autres structures pédagogiques ou sociales, dans la continuité des premières expériences menées avec le Centre National du Cirque et l’Ecole de Cirque de Lomme en 2005 et 2006.
Le phénomène est tellement unique que la troupe a droit à son propre livre : Taoub - Le Groupe Acrobatique de Tanger, un ouvrage de 232 pages qui dresse le portrait de ces artistes et relate leur aventure (éditions Senso Unico et ed. du Sirocco, 2012)
La Brèche – Pole cirque en Normandie
Janvier 2016
Le Groupe acrobatique de Tanger bouscule depuis une dizaine d'années l'histoire de l'acrobatie marocaine. En quoi HALKA revisite-t-il cette tradition ?
Abdeliazide Senhadji : Nous souhaitons en effet remettre cette tradition au goût du jour. Depuis toujours, les jeunes Marocains apprennent cet art sur le sable de la plage de Tanger. Un art qui se transmettait ensuite de famille en famille, avec une dimension spirituelle.
Les acrobates et moi avons envie de revenir aux racines de cette discipline. D'ailleurs notre première rencontre s'est faite à Tanger, en novembre 2015. Nous n'en sommes qu'au début, mais nous avons un rêve : intégrer l'acrobatie dynamique aux figures plus statiques. HALKA signifie l'énergie du cercle et par extension tout spectacle en plein air : l'essence même de l'acrobatie marocaine. Nous nous inspirons aussi de la tradition du Hlaïkya, l'amuseur public.
Le spectacle part donc du savoir-faire de ces jeunes artistes. Comment le décririez-vous ?
AS : C'est vrai que je souhaite partir de leur propre tradition et non calquer sur eux des choses qui ne leur ressemblent pas. Les artistes du Groupe acrobatique de Tanger sont culturellement très riches, de joie, de musique, de chant et bien sûr d'acrobaties. La dimension spirituelle dont je parlais tout à l'heure est importante chez eux, notamment dans la pratique du chant. Nous allons apprendre à nous connaître et à écrire HALKA ensemble.
Jusqu’ici les artistes du Groupe acrobatique de Tanger n’ont pas pris une grande place dans l’écriture de leurs précédents spectacles. À moi de leur laisser le temps d'intégrer cette liberté. J'ai vraiment envie qu'ils s'emparent de leur histoire. Mon travail de mise en scène consiste à les amener à trouver l'écrin de lumière qui fera naître des choses en eux.
Avec son spectacle « Malka », on revient aux sources de l'acrobatie marocaine, enseignée depuis des siècles sur les plages du pays et transmise de famille en famille. Une dimension spirituelle s'échappe instantanément des prouesses puissantes et singulières des quatorze artistes sur scène. Les acrobaties envoûtent, rythmées par les percussions et des cris de poésie qui renvoient à un espace de liberté sans frontières. Moderne et traditionnel à la fois, le spectacle est en mouvement permanent, porté par une troupe aussi dynamique que talentueuse. Le Parisien
La chorégraphie parle des chimères qui dominent les hommes, et qui se répercutent jusque dans la création artistique : les velléités de pouvoir, la rivalité et la vanité. C’est une foule de personnages singuliers, vivants et expressifs qui se côtoient, chahutent, se joignent en figures, et se dispersent dans le paysage qui est suggéré par l’amplitude et la structuration de leurs mouvements. Le rythme a la cohérence d’une fable musicale qui se termine en une apogée de joie tandis que les acrobates forment le cercle de la halka, chantante, musicale, et dansante. La Halka invite les spectateurs à composer une grande communauté autour des artistes. Tout au long du spectacle, une émotion grandissante nous a envahi, provoquée particulièrement par la musique traditionnelle marocaine interprétée au chant, au tambour ou bendir, et au guenbri. Le groupe acrobatique de Tanger ne donne pas seulement un spectacle, il s’adresse aux spectateurs par des voies spirituelles et sensuelles, et l’enjoint à une fête extatique. La Galerie du spectacle
Cette troupe de 14 acrobates raconte sa propre histoire dans Halka, mot arabe signifiant « cercle », mouvement central de la pièce. Sur un plateau nu, ils narrent leurs débuts sur la plage où ils apprirent l’exécution de la roue attachés à leur maître par une ceinture. Ils évoquent la destruction de leur lieu de travail, cette fameuse digue de Tanger désormais rasée pour laisser place à une Marina, lors d’une scène poétique où le sable s’écoule du ciel… Ils nous parlent aussi de leurs amis qui ont tenté de traverser la Méditerranée, espérant un ailleurs meilleur mais n’en revenant jamais… Drôle, triste et diablement spectaculaire, Halka dépeint la vie de ces artistes singuliers avec ses bas, ses combats et ses très, très hauts. LM Magazine
Un spectacle puissant, granuleux et viril qui enchaîne chants traditionnels et tableaux hautement politiques. On retrouve les codes de la rue : l’esquive, la ruse, l’humour. La rapidité et la fuite s’encastrent comme les corps compacts et trapus qui courent et sautent, aussi aériens que maladroits. La testostérone règne en maître, les femmes rivalisent de force avec les hommes. Les chants et musiques folkloriques sont d’une poésie troublante. Une partie est traduite sur la feuille de salle, on regrette de ne pas en comprendre le reste tant ils nous prennent les tripes et la gorge... Toutelaculture.com