À partir d’itinéraires croisés, d’images et d’imageries, Anne Monfort prépare son spectacle No(s) révolution(s) comme on mène une enquête : que transmet-on d’une génération à une autre ? D’un pays à l’autre ? Les biographies, vraies ou fausses, se mêlent et se confondent entre fiction et Que deviennent nos révolutions ?documentaire pour parler de la marge, des révolutions manquées ou réussies, de cette fragile sensation d’Europe. Avec la collaboration de deux auteurs, Ulrike Syha (allemande), Mickael de Oliveira (portugais) et de l’historienne Maud Chirio, elle s’attache à décrypter ce qui fait révolution, dans un pays, dans une époque, chez un individu. Si l’on considère que les étapes sont les suivantes : la rédaction d’un manifeste, l’accélération du temps révolutionnaire, le passage à l’acte, l’affrontement et la peur, la recherche d’un accord, quels révolutionnaires sommes-nous ?
Ici et maintenant, quatre acteurs, de trois nationalités (allemande, française, portugaise), parlent de leurs souvenirs de révolution et de la possibilité d’une révolution aujourd’hui.
Cette communauté va traverser l’imagerie des révolutions passées et de leurs traces. On reconnaîtra, comme des flashs subliminaux, Marat assassiné, une femme au drapeau, des bras qui passent au-dessus d’un mur, les images des oeillets … « Notre » révolution imaginaire se construit à partir d’anecdotes venues de divers lieux et différentes époques.
Pour concevoir No(s) Révolution(s), je travaille avec deux auteurs, l’Allemande Ulrike Syha et le Portugais Mickael de Oliveira, qui créeront à quatre mains une matière textuelle unique. Il m’a semblé important de convoquer deux auteurs pour garder la dimension du désaccord, de la discussion, du pro et contra. En lien avec une historienne, Maud Chirio, ils inventent la forme théâtrale qui pourrait naître de nos échanges. Certains concepts politiques, liés à l’histoire nationale, s’avèrent impossibles à transposer. Cette dimension « intraduisible » et le processus de la traduction lui-même y deviennent aussi matière de plateau. Le spectacle se jouera dans les trois pays – France, Allemagne, Portugal - dans trois versions réinventées dans chaque pays, où les trois langues s’entendent et se répondent sur le plateau.
J’imagine un spectacle où les acteurs échangent des idées, travaillent des concepts, interrogent avec les spectateurs notre positionnement politique aujourd’hui. Une parole réflexive, un non-jeu, comme dans certains films de Godard (je pense à Deux ou trois choses que je sais d’elle ou à Masculin/Féminin), un jeu entre l’acteur et le personnage, où chaque acteur travaille de façon documentaire, à partir de sa personnalité, pour entrer brusquement dans une fiction. Comme dans la « scène de la rue » de Brecht, on nomme une chose, et l’acteur la fait immédiatement advenir, l’invente en direct et de façon ludique sur le plateau. Je pense aussi au travail de la réalisatrice Dominique Cabrera dans Le beau dimanche qui raconte la journée du 17 juillet 1791 vue d’aujourd’hui : très directes, les prises de parole se réfèrent à hier comme à aujourd’hui, travaillant entre l’acteur d’aujourd’hui et le souvenir d’une figure ou d’un personnage, et laissent peu à peu la place à des corps qui créent les images.
Nos quatres acteurs arrivent avec leur culture nationale, leurs points de vue ou leurs préjugés sur la notion de révolution, et interrogent la pertinence ou non de ce type d’action aujourd’hui. La révolution est-elle, comme le dit Camus, l’irruption d’une idée dans le pragmatisme ? La violence et la terreur sont-elles évitables ? La révolution est-elle forcément une déception ? Les héros finissent-ils comme le Coriolan de Shakespeare, happés par le démon de l’ambition et du pouvoir personnel ? Les révolutionnaires de 1789 étaient obsédés par le jugement que la postérité porterait sur leur action. Que diront les générations futures ? actuelles ? et quelles sont leurs révolutions, et celles qu’elles ne font pas ? Quel est l’héritage des révolutions ? et leur folklore, leur kitsch ? voire leur « tourisme »? Comme l’interroge l’historienne Sophie Wahnich (1), pourquoi a-t-on aujourd’hui, depuis 1989, intériorisé l’idée que l’utopie et le désir d’une vie meilleure mènent forcément au totalitarisme ? Comment aujourd’hui, créer l’irréversible ?
Les acteurs/personnages vont vivre les tensions et les dissensions d’une communauté en devenir ou en création. Venant ponctuer leurs paroles, apparaîtront dans leurs corps, les images des révolutions passées ou présentes. Les révolutions se sont toujours citées mutuellement, déclinant les mêmes imageries. No(s) Révolution(s) fait coexister une parole d’ici et maintenant, et, des images mythiques, appartenant à l’inconscient collectif, comme des flashs subliminaux qu’on ne reconnaîtrait pas forcément. Soudain, les acteurs s’interrompent et prennent une pose inspirée d’une photo des capitaines d’avril. Un acteur laisse tomber son bras le long de sa chaise et on reconnaît Marat assassiné.
L’espace travaillera sur le fait de désamorcer le quatrième mur, pour ouvrir les réflexions des acteurs au public. On jouera aussi sur la notion d’intérieur et d’extérieur : l’intérieur des lieux de rencontre et de débat, l’extérieur de la rue où le peuple prend la parole. Nous travaillerons sur des objets polysémiques, sur les traces des révolutions dans les villes. Un point de départ, au même titre que les conversations avec les acteurs et les recherches documentaires, a été la salle de bal du Ballhaus Ost à Berlin, où le spectacle sera créé. La salle de bal, lieu de rencontre entre classes et entre générations, nous semble parler de la révolution. Aujourd’hui, j’imagine au début du spectacle une salle de bal vide, abandonnée ; des restes de fête, des fleurs fanées, une baignoire isolée au milieu. Comme si l’ennemi était parti, avait déserté.
Les grandes fenêtres du Ballhaus évoquent la ville à l’extérieur - de l’autre côté, il pourrait y avoir un bâtiment institutionnel, un rassemblement. Entre barricade et fragilité, le bruit de la rue, des carreaux qui peuvent être cassés, racontent un passage… ou une intrusion, créent une porosité et une attirance qui peuvent être douces comme violentes ; le discours intime s’échappe à l’extérieur.
Nous n’avons pas voulu raconter une seule révolution, que ce soit la révolution des oeillets, la révolution française, la « révolution pacifique » de 1989 en Allemagne ou les printemps arabes. Nous préférons prendre des événements dans chacune de ces révolutions, en leur ôtant leurs ancrages spécifiques ou les allusions qui les limiteraient à un pays ou à une époque, et composer, à partir de là, une révolution nouvelle, qui pourrait avoir lieu aujourd’hui, à l’extérieur, tout près. Une révolution où il pourrait y avoir à la fois la double proclamation d’une république à deux heures d’intervalle, un moment de confusion où personne ne sait qui est prisonnier de qui, l’erreur d’un dirigeant qui déclenche la chute d’un mur en disant « je crois que c’est maintenant »… On travaillera parfois sur des matériaux historiques, des réécritures de discours, mais toujours en les transposant aujourd’hui. On prendra comme paradigme de scènes les motifs communs à toutes les révolutions : la tentative de rédiger un texte, la figure de l’exilé, l’accélération du temps révolutionnaire, la question du passage à l’acte, l’affrontement et la peur, la tentative de trouver un accord.
A la fin du spectacle, nous imaginons une dernière partie où réapparaîtrait peu à peu un quatrième mur, où le texte laisse peu à peu la place à l’image, et où la révolution s’évoque en creux, dans le cadre de l’intime. Une femme face à un tissu rouge, interrogative, au milieu de gens qui s’agitent. Des êtres qui dorment ou ne veulent pas voir. Et parfois, une tentative de se toucher, de s’effleurer. On se presse le pouls mutuellement pour vérifier que l’on n’a pas peur. Un homme raconte à sa femme, pendant qu’elle prend un bain, qu’il veut écrire un roman sur la révolution, et qu’il doit rompre cela lui prend tout son temps et toute sa vie. Des objets, des symboles reviennent. Grandola, vila morena, la chanson qui a inauguré la révolution portugaise, passe dans un poste à l’arrière, brouillée. La couleur rouge, absente du début du spectacle, fait son apparition. Cette dernière partie, chorale, reprend les éléments de la première sur un autre mode, celui de la fiction, peut-être dans une forme d’apaisement, ou d’espoir d’une nouvelle façon de faire la révolution, une révolution peut-être sans Etat, où l’on ne se vengerait pas mais où l’on oublierait pour pouvoir vivre ensemble (2). ANNE MONFORT 25 novembre 2014
(1) Sophie Wahnich, La liberté ou la mort. Essai sur la terreur et le terrorisme, La fabrique, 2003.
(2) Eric Hazan et Kamo, Premières mesures révolutionnaires, La fabrique, 2013.
Mickael : - La révolution pose la question de la communauté. Aujourd’hui, on a un déficit de communauté et c’est ce qui explique l’absence de révolution.
Anne : - C’est le sujet de Stiegler, dans Du 11 septembre au 21 avril, un sujet qui est vraiment emblématique de notre génération.
Mickael : - Je pense au Coriolan de Shakespeare, qui est l’exact inverse de nos capitaines d’avril qui ont eu la sagesse de se retirer du pouvoir après la révolution.
Anne : - On pourrait partir de fausses biographies, avec des éléments documentaires et des éléments fictionnels, dont l’assemblage serait une création.
Ulrike : - Dans Radikale, j’avais travaillé sur des fausses biographies, justement : dans la structure de la pièce, elles étaient autonomes, mais pouvaient se relier : le personnage secondaire de l’une devenait le personnage principal de l’autre.
Anne : - Ce serait dommage de réduire au point de vue national et d’avoir un vis-à-vis de l’auteur portugais face à l’auteur allemande avec la metteur en scène française comme arbitre.
Mickael : - Il faudrait enlever toutes les allusions trop explicites. Par exemple, je ne parlerai pas de la guerre en Angola, mais de la guerre coloniale.
Ulrike : - Et moi je préfère parler du concept de la révolution, plus que de la chute du mur ou du 9 novembre 1918.
Anne : - On pourrait ainsi créer une ville et une histoire fictives, mais extrêmement documentées.
Ulrike : - Ainsi, chaque spectateur peut projeter quelle est cette ville, quelle est cette histoire.
Depuis le début, la conception de l’ensemble du projet se fait à trois. J’ai sollicité Mickael de Oliveira, dont je connaissais l’écriture nerveuse, l’engagement politique fort, la théâtralité frontale qui reprend souterrainement des matériaux classiques, développe ces trames et les fait résonner aujourd’hui. J’ai fait appel à Ulrike Syha, dont j’apprécie l’humour décalé, le don de la structure, de l’enchâssement, d’un dédoublement, d’un théâtre-récit qui alterne la fiction et la pensée. Tous deux ont répondu positivement à ma proposition de travailler sur une écriture de plateau qui tend vers une pièce unique.
Nous avons parlé ensemble de références communes aptes à constituer la base du travail, La communauté inavouable (Maurice Blanchot), La mort de Danton (Büchner), L’homme révolté (Camus), Une révolution allemande (Döblin), Indignez-vous (Stéphane Hessel), Le temps d’aimer le temps de mourir (Fritz Kater), La Mission, Vie sous deux dictatures, Pièce de coeur (Heiner Müller), Coriolan (Shakespesare), Lisbonne dernière marge (Antoine Volodine).
Pour commencer le travail, j’ai proposé aux auteurs des contraintes similaires : écrire à partir de dates (1974, 1984, 1989), répondre à des questions (qu’est-ce qui t’indigne ? que signifie la révolution pour toi ?). Ils écriront d’abord séparément, même si nous nous voyons régulièrement pour penser la structure générale de la pièce.
En septembre 2014, les auteurs ont proposé une première phase d’écriture, amenée à être éprouvée au plateau avec les acteurs pendant une dizaine de jours lors d’une résidence au Théâtre Paul Eluard de Choisy, coproducteur du spectacle. Suite à cette première période de plateau, les auteurs ont proposé des matériaux, des premiers textes. En janvier 2015, nous nous sommes retrouvés tous les trois à l’Institut français de Lisbonne pour décider de la structure et des grandes lignes dramaturgiques du spectacle. Les auteurs sont répartis en écriture pour proposer le texte aux acteurs lors d’une étape de travail en Avril 2015 au Théâtre Paris-Villette.
Animant régulièrement des stages et workshops, que ce soit à destination de publics scolaires ou de jeunes acteurs (EDT 91, CEPIT de Poitiers, DEUST de Besançon, Conservatoire de Belfort), j’inviterai les deux auteurs à m’accompagner, ensemble au séparément, pendant les deux saisons que durera le processus de création, afin de faire connaître leurs écritures et de poursuivre mon travail de plateau en dialogue avec elles. ANNE MONFORT
« Le mouvement de révolte, à l’origine, tourne court. Il n’est qu’un témoignage sans cohérence. La révolution commence au contraire à partir de l’idée. Précisément, elle est l’insertion de l’idée dans l’expérience historique quand la révolte est seulement le mouvement qui mène de l’expérience individuelle à l’idée. » (Camus)
« Une révolution est une tentative pour modeler l’acte sur une idée, pour façonner le monde dans un cadre théorique. C’est pourquoi la révolte tue des hommes alors que la révolution détruit à la fois des hommes et des principes. Mais pour les mêmes raisons, on peut dire qu’il n’y a pas encore eu de révolution dans l’histoire. Il ne peut y en avoir qu’une qui serait la révolution définitive.» (Camus)
« Les révolutionnaires de 1789 ne pouvaient pas imaginer les libertés telles que nous les imaginons aujourd’hui » (Hannah Arendt)
« Le mot ‘révolutionnaire’ ne peut s’appliquer qu’aux révolutions dont la liberté est le but » (Condorcet)
La fin de l’homme rouge (Svetlana Alexievitch )
Sur la révolution (Hannah Arendt)
La communauté inavouable (Maurice Blanchot)
La mort de Danton (Georg Büchner)
L’homme révolté (Albert Camus)
Peur, révérence, terreur (Carlo Ginzburg)
Indignez-vous (Stéphane Hessel)
Le temps d’aimer, le temps de mourir (Fritz Kater)
La mission, Vie sous deux dictatures (Heiner Müller)
Aimer, s’aimer, nous aimer. Du 11 septembre au 21 avril (Bernard Stiegler)
Lisbonne dernière marge (Antoine Volodine)
Marat Sade (Peter Weiss)
Nous autres (Ievgueni Zamiatine)
Révolutions. Quand les peuples font l’histoire (Maud Chirio, Mathilde Larrère)
La barricade. Histoire d’un objet révolutionnaire (Eric Hazan)
Une histoire de la révolution française (Eric Hazan)
Premières mesures révolutionnaires (Eric Hazan et Kamo)
La Commune. Histoire et souvenirs (Louise Michel)
Pour le bonheur et pour la liberté (Robespierre)
Paris, bivouac des révolutions (Robert Tombs)
La liberté ou la mort. Essai sur la terreur et le terrorisme (Sophie Wahnich)
Le beau dimanche (Dominique Cabrera)
La chinoise (Jean Luc Godard)
La commune (Peter Watkins)
Le fond de l’air est rouge (Chris Marker)
Français si vous saviez (André Harris)
Souvenirs de Berlin-Est (Sophie Calle)
Waste Land (Vik Muniz)
MICKAEL DE OLIVEIRA
Auteur
« Le projet d’Anne Monfort m’a tout d’abord intéressé, car le défi de penser les révolutions et les impasses pour les créer dans des moments forts de crise est un thème très présent au Portugal. La dernière révolution date de 1974, moment de virage vers une construction démocratique qui a fait cesser plus de 40 ans de dictature fasciste, orchestrée par le pouvoir et la personnalité de António Oliveira Salazar, qui est née et a grandi très près de chez mes parents, dans une ville pauvre du Portugal, au nord du pays.
Penser la révolution, c’est réfléchir aussi sur le fascisme et ses conséquences: émigration, donc, ma propre histoire, étant née et ayant grandi en France. La France est pour moi plus qu’un territoire: c’est une langue et une culture imprégnée d’idéaux révolutionnaires. J’ai appris à l’école française, dans les années 80, que la révolution était basée sur des principes simples - liberté, égalité et fraternité, en ajoutant «maternité», car ma langue maternelle est la vôtre, la nôtre. J’ai aussi compris, très tôt, que cette idéal républicain été devenu, au fil du temps (depuis 1789...), un simple concept d’espoir. Que faire aujourd’hui de ce concept et comment réagir face à cette idée, dans un cadre aujourd’hui européen et démocratique ? C’est la question de No(s) Révolution(s).»
MICKAEL DE OLIVEIRA
MICKAËL DE OLIVEIRA est né en France, en 1984. Il vit au Portugal depuis 1999.
Après une licence et un master en Études Artistiques - option Théâtre, à la Faculté de Lettres de l’Université de Coimbra, Mickael de Oliveira a obtenu son doctorat sur la dramaturgie contemporaine portugaise à la Faculté de Lettres de l’Université de Lisbonne en Études Théâtrales. Il est auteur/dramaturge et a reçu deux prix, la Mention Honorable du Prix Luso-Brésilien António José da Silva (Théâtre National D. Maria II [PT], FUNARTE [BR]) en 2009 pour Clytemnestre, ainsi qu’en 2008 le Prix de la Nouvelle Dramaturgie Maria Matos pour Il a livré ton bien à ceux qui meurent. Il est co-fondateur de la compagnie Colectivo 84 [Lisbonne] , avec le metteur en scène John Romão, et a écrit plusieurs textes pour la scène, dont Hippolyte - monologue masculin sur la perplexité (2009, mise en scène de John Romão, co-prod. ZDB-Negócio/Lisbonne), Monologues et autres matériels pour le spectacle Vitesse Maximum (2009, John Romão, co-prod. Festival CITEMOR/Théâtre La Laboral [Gijón/ES]), Seul les idiots veulent être radicaux (2010, J. Romão), Textes pour des apocalypses (2010, J. Romão co-prod. Festival CITEMOR), Nous allons te guérir par l’excès (2011, Luís Mestre, co-prod. Théâtre Nouvelle Europe [Porto]), Horreur – brève étude sur la paralysie au Théâtre National D. Maria II de Lisbonne, en Juin 2011, mise en scène de John Romão. Son dernier texte, Boris Yeltsine a été mis en scène par Nuno M Cardoso au São Luiz Théâtre Municipal (Lisbonne) et au Teatro Nacional São João (Porto/Portugal).
L’ensemble de ses textes sont en cours de publication aux Edições Húmus, Porto.
Plusieurs de ses textes sont traduits en français, anglais, espagnol, slovaque et ont déjà été joués en Espagne, en Slovaquie, lus en France (Rouen, Théâtre des 2Rives), Belgique (Liège, Théâtre de La Place) et Suisse (Genève, Comédie de Genève). Il est directeur artistique du festival Rencontres des Nouvelles Dramaturgies Contemporaines à Lisbonne qui a pour but de promouvoir la nouvelle dramaturgie portugaise et européenne, en partenariat avec Corps de Textes Europe. Son dernier texte, qu’il a co-mis en scène avec Nuno M Cardoso, est une réécriture de Il a livré ton bien à ceux qui meurent, s’intitule Oslo – Fuck them all and everything will be wonderful, et s’est créé au Teatro Académico de Gil Vicente (Coimbra / Portugal), en mars 2014.
Il a été professeur à l’École Supérieur d’Education et Sciences Humaines de Leiria, au Conservatoire de Théâtre de Lisbonne (Escola Superior de Teatro e Cinema). Il est actuellement professeur d’Études Théâtrales à la Faculté de Lettres de l’Université de Coimbra et Directeur-adjoint du Teatro Académico de Gil Vicente..
ULRIKE SYHA
Auteur
« Quand Anne Monfort m’a demandé si je voulais participer au projet No(s) Révolution(s), j’ai aussitôt accepté avec enthousiasme.
Ce projet me séduit pour différentes raisons.
D’une part c’est toujours pour moi, auteur, une expérience riche de quitter mon lieu de travail habituel, le bureau, pour expérimenter des méthodes de travail et de production qui me soient nouvelles. Ainsi, dans ce projet, le fait que les textes ne soient pas écrits à l’avance, complètement indépendamment, m’intéresse particulièrement. Ils naissent en dialogue, au sens le plus fort du terme – en dialogue entre deux auteurs, en dialogue avec la metteur en scène, en dialogue avec les acteurs. Et les textes qui émergent ne sont pas les seuls à être exposés à ce dialogue, mais nous aussi, leurs créateurs.
A mes yeux, ce processus de travail reflète merveilleusement le sujet du projet : l’Europe et ses révolutions. C’est pour moi au meilleur sens du terme un projet européen, tant dans la forme de sa création comme dans sa présentation et son multilinguisme.
Il n’est que logique de jouer cette pièce dans différentes villes des pays impliqués.
Par ailleurs le sujet des « révolutions » en soi me passionne. Particulièrement car, dans le cadre de ce projet, nous cherchons à traiter le concept de révolution non seulement sur un plan documentaire, avec des éléments précis, mais également à le questionner plus généralement, avec différentes perspectives, et pas uniquement chacun selon notre expérience nationale. C’est également cette dimension européenne qui me plaît dans cette idée.
Le XXI siècle est et sera marqué par des révolutions sous leurs formes les plus diverses, le sujet en est intemporel. Nous en suivons tous les évolutions par exemple en Egypte ou en Ukraine, même si ce n’est que par l’intermédiaire des medias.
Je pense qu’il est important d’interroger le concept de bouleversement en tant que tel, et, que ce soit dans sa propre histoire, dans celle d’autres pays, de chercher des échos, des questions, et des réponses.»
ULRIKE SYHA
ULRIKE SYHA est née en 1976 à Wiesbaden. Après avoir fait des études de dramaturgie à Leipzig et travaillé comme assistante à la mise en scène au Schauspiel de Leipzig, elle est aujourd’hui auteur indépendante à Hambourg.
Ulrike Syha a été notamment boursière de l’Akademie Schloss Solitude, du Literarisches Colloquium ide Berlin, de l’Académie allemande de Rome (Casa Baldi), du JAK Budapest et de la fondation Stiftung Künstlerdorf Schöppingen.
Elle a reçu le prix Kleist pour les jeunes auteurs, et le prix de Hambourg de littérature, et ses pièces ont été invitées à plusieurs reprises au festival de Mülheim. Elle a été auteur associée au Théâtre National de Mannheim en 2009/2010.
Outre ses nombreux projets en Allemagne et à l’étranger, elle a été en France auteur en résidence à Toulouse en 2005, avec le soutien du DAAD et du Goethe Institute, suite à la publication de sa pièce Conduire en Allemagne aux éditions Nouvelles scènes allemandes. Elle a participé également au projet « Confessions » initié par Michel Didym à la Manufacture de Nancy en 2012.
ANNE MONFORT
Mise en scène
Après des études littéraires (Ecole Normale Supérieure, doctorat), Anne Monfort décide de se tourner vers la mise en scène et se forme notamment auprès de Thomas Ostermeier. De retour en France, elle monte ses premiers spectacles, à partir de textes de l’auteur allemand Falk Richter, qu’elle traduit également : elle met en scène Dieu est un DJ en 2002, Tout. En une nuit. en 2005 puis Sous la glace en 2007 et Nothing hurts en 2008. Elle cherche à faire connaître en France cet auteur qui allie la colère politique et la quête intime – elle sera ainsi dramaturge de Cyril Teste sur sa mise en scène d’Electronic City et traduit Le Système et My secret garden pour Stanislas Nordey.
Elle travaille aussi sur des montages de textes, comme Laure, d’après Colette Peignot (Granit, Paris Villette), ce qui lui permet de questionner une dramaturgie très en lien avec le plateau, proche de la performance.
De 2007 à 2011, elle est artiste associée au Granit-Scène nationale de Belfort. Anne Monfort commence à travailler sur sa propre écriture, en lien avec des formes plastiques. Ainsi naît Next Door, forme investissant des appartements vides à partir de principes de films de Godard et adaptant librement des textes de Balzac et Ulrike Meinhof. A partir de ce travail, Anne Monfort poursuit sa recherche de formes pluridisciplinaires sur l’expression de l’intime et du politique, en écrivant des textes spécifiques pour ses formes scéniques.
Elle crée ensuite Si c’était à refaire, qui traite de la notion de responsabilité pénale et juridique (création en mars 2010 au Granit), premier projet véritablement d’écriture, où elle travaille sur une langue spécifique qui mêle le quotidien, le juridique et le poétique.
Puis vient le diptyque Notre politique de l’amour, composé de Tout le monde se fout de la demoiselle d’Escalot et Ranger (sa vieille maîtresse), qui est un pas de plus vers une écriture de plateau qui invite des artistes dans le processus de travail, comédiens, plasticienne, musicien et se constitue au fur et à mesure des répétitions.
Elle poursuit son travail de recherche sur les formes en s’associant à l’auteur Sonia Willi, afin de mettre en place une collaboration approfondie entre écriture textuelle et écriture de plateau : elle créera ainsi en mars 2012 à la Halle aux Grains-Scène nationale de Blois Quelqu’un dehors moi nulle part, de Sonia Willi.
Anne Monfort poursuit également sa recherche sur sa propre écriture de plateau, où coexistent différents types de présence (acteurs, performer), où le visuel s’allie au textuel, en mettant en place un projet intitulé Les fantômes ne pleurent pas autour de la notion de fantastique. Le spectacle se crée en mai 2012 au Granit, et propose un dispositif autour de la notion de point de vue – les spectateurs, séparés en deux groupes, assistent à deux versions contradictoires de la même histoire, entrelacées d’images oniriques, reliant les deux côtés.
Anne Monfort retrouve l’auteur Falk Richter pour la saison 2013-2014 avec Et si je te le disais, cela ne changerait rien (création février 2014, Le Granit, Le Nouveau Relax Chaumont, Le Théâtre Paul Eluard Choisy-le-Roi) où elle met au plateau les textes inédits des journaux d’écritures de l’auteur.
Anne Monfort mène régulièrement des actions de formation (notamment en lycée, en partenariat avec le Granit) et intervient également à l’Ecole de la Comédie de Saint Etienne, aussi sur des thématiques qui questionnent l’écriture de plateau, les rapports entre l’écriture et la mise en scène (stage sur l’adaptation scénique d’un roman en juin 2009), et l’acteur entre jeu et non-jeu (stage « nouvelle vague degré zéro » en janvier 2011). Elle anime également un stage en avril 2011 au Conservatoire à Rayonnement Régional de Poitiers autour de l’écriture de Falk Richter, en décembre 2013 à L’université de Strasbourg, en Février 2014 au Conservatoire de Belfort. Elle initie pour avril 2014, un projet croisé avec des jeunes allemands et français, en partenariat avec le Théâtre Paul Eluard de Choisy-le-Roi, autour d’Indignation de Stéphane Hessel. En 2014-2015, elle anime un satge au DEUST de Besançon et un stage auprès d’amateurs à DSN-Scène nationale de Dieppe autour de l’écriture de jeunes auteurs allemands.